Un groupe de travail mené par Jean-Pierre Dintilhac, Président de la deuxième chambre de la Cour de Cassation, a été chargé en 2005 par la chancellerie de travailler sur une classification des postes de préjudices.
Une nomenclature établissant et définissant chaque poste de préjudices corporels indemnisables a ainsi été élaborée, fixant les principes de l’évaluation de la réparation des dommages corporels et une harmonisation des méthodes d’indemnisation.
Elle est devenue un outil de référence dans le cadre de l’indemnisation des victimes de préjudices corporels permettant d’appliquer le principe d’une indemnisation complète, équitable et une égalité de traitement entre toutes les victimes.
Découvrez ci-après en détail chaque poste de préjudices corporels prévus par la nomenclature DINTILHAC.
Préjudices indemnisables des victimes directes
1 – Préjudices patrimoniaux
Les préjudices patrimoniaux doivent être entendus comme étant l’ensemble des atteintes aux biens de la victime. Ceux-ci doivent être divisés en deux catégories, selon la période : avant consolidation et après consolidation.
a) Préjudices patrimoniaux temporaires (avant consolidation) :
Dépenses de santé actuelles (DSA)
Exemple : frais médicaux, dépassement d’honoraires intervention chirurgicale, frais d’hospitalisation, ticket modérateur, séance de kinésithérapie, ostéopathie, ergothérapie, EMDR, séance de psychologue, orthopédie, acupuncture, …
Frais divers
- L’assistance par une tierce personne permet la prise en charge des frais engagés pour les besoins de la vie courante du fait d’une réduction d’autonomie, que cette assistance soit réalisée par un professionnel ou un proche. Exemple : aide-ménagère, garde d’enfants, entretien du jardin
- Les frais d’assistance à expertise médicale par un médecin conseil peuvent également faire l’objet d’une prise en charge intégrale. Autres exemples de frais divers : indemnités kilométriques, frais transport VSL/taxi, effets endommagés (vêtements, équipements, téléphone portable), …
Pertes de gains professionnels actuels (PGPA)
Ce sont les pertes de revenus subis du fait des périodes d’arrêts de travail (salaire, primes, intéressement, participation, paniers repas, congés payés, frais de déplacement …) jusqu’à la consolidation.
b) Préjudices patrimoniaux permanents (après consolidation) :
Dépenses de santé futures (DSF)
Ce sont les dépenses de santé prévisibles, à réaliser par la victime et rendues nécessaires au traitement de sa pathologie.
Exemple : mise en place de prothèse et/ou renouvellement, frais d’hospitalisation, frais médicaux et paramédicaux, ablation de matériel d’ostéosynthèse, …
Frais de logement adapté (FLA)
Frais engagés par la victime pour adapter son logement à son handicap. Il pourra s’agir également de l’achat du logement.
Exemple : rampe d’escalier, douche, aménagement logement, frais de déménagement
Frais de véhicule adapté (FVA)
Frais engagés par la victime pour adapter son véhicule à son handicap.
Exemple : prise en charge du surcoût à l’achat d’un véhicule à boîte automatique, adaptation du poste de conduite
Assistance par tierce personne (ATP)
Assistance permanente par une tierce personne pour aider la victime dans les actes de la vie quotidienne.
Pertes de gains professionnels futurs (PGPF)
Ce sont les pertes de revenus subis de manière définitive résultant de la perte ou du changement d’emploi.
Exemple : licenciement, exercice de l’activité à temps réduit, changement d’emploi engendrant des revenus inférieurs à ceux perçus avant l’accident.
Incidence professionnelle (IP)
Exemple : dévalorisation sur le marché du travail, fatigabilité au travail, pénibilité ou une gêne accrue à la pratique de la profession de la victime, impossibilité d’évolution professionnelle, reclassement professionnel, frais de formation, perte de droit à la retraite, …
Préjudice scolaire, universitaire ou de formation (PSU)
Ce préjudice est caractérisé par la perte d’années scolaires, universitaires ou de formation.
Exemple : modification d’orientation, renonciation à toute formation
2 – Préjudices extra-patrimoniaux
Les préjudices extra-patrimoniaux sont les préjudices portant atteinte directement à l’intégrité physique et psychique de la victime. Ceux-ci doivent également être divisés en deux catégories, selon la période : avant consolidation et après consolidation.
a) Préjudices extra-patrimoniaux temporaires (avant consolidation) :
Déficit fonctionnel temporaire (DFT)
Incapacité fonctionnelle totale ou partielle subie par la victime jusqu’à consolidation de son état de santé. Cela se caractérise donc par les gênes dans les actes de la vie courante.
Exemple : perte de qualité de vie, séparation familiale, incapacité temporaire d’effectuer des activités ménagères ou également de sport et de loisirs (vélo, jardinage).
Souffrances endurées (SE)
Les souffrances endurées correspondent aux souffrances subies par la victime de l’accident jusqu’à la consolidation de son état de santé.
Préjudice esthétique temporaire (PET)
Lorsque la victime subit une altération temporaire de son apparence physique (traumatisme visage et/ou corps, brûlures, cicatrices, port d’une minerve, boiterie, utilisation d’une canne…).
b) Préjudices extra-patrimoniaux permanents (après consolidation) :
Déficit fonctionnel permanent (DFP)
Ce poste de préjudice personnel correspond à la réduction définitive du potentiel physique, psychosensoriel et/ou intellectuel. Cela se caractérise notamment par des douleurs physiques et psychologiques permanentes ressenties, une perte de qualité de vie et des incidences sur les conditions d’existence.
Préjudice d’agrément (PA)
Le préjudice d’agrément vise à réparer l’impossibilité ou la gêne à la pratique des activités sportives et de loisirs.
Préjudice esthétique permanent (PEP)
Lorsque la victime subit une altération définitive de son apparence physique (traumatisme visage et/ou corps, brûlures, cicatrices, port d’une minerve, boiterie, utilisation d’une canne…).
Préjudice sexuel (PS)
Ce poste de préjudice vise à indemniser la victime des trois atteintes suivantes : atteinte aux organes sexuels ; préjudice lié à l’acte sexuel ; préjudice lié à la fertilité.
Préjudice d’établissement
Ce poste de préjudice correspond à une atteinte d’une exceptionnelle gravité faisant perdre tout espoir ou toute chance de réaliser un projet familial normal comme fonder une famille.
Préjudices permanents exceptionnels
Directement lié au déficit fonctionnel permanent, ce poste de préjudice s’entend comme devant être atypique ou spécifique en raison par exemple de la qualité de la victime ou des circonstances de l’accident.
Exemple : préjudice découlant de catastrophe naturelle, industrielle ou attentat.
b) Préjudices extra-patrimoniaux évolutifs (hors consolidation) :
Préjudices liés à des pathologies évolutives
Préjudices indemnisables des proches de victimes décédées
1 – Préjudices patrimoniaux
Frais d’obsèques
Il s’agit des dépenses consécutives au décès de la victime engagées par ses proches
Exemple : frais de sépulture, frais de concession funéraire, frais de crémation, frais d’inhumation…
Frais divers des proches
Il s’agit de frais spécifiques assumés par les proches : frais de transport, frais d’hébergement et de restauration.
Pertes de revenus des proches
Il s’agit des pertes de revenus subies par le conjoint/concubin et les enfants à charge.
2 – Préjudices extra-patrimoniaux
Préjudice d’accompagnement
Ce poste de préjudice s’entend comme l’accompagnement de fin de vie par un proche et occasionnant à cet égard des troubles et des perturbations dans ses conditions d’existence.
Préjudice d’affection ou préjudice moral
Le préjudice d’affection vise à indemniser les souffrances et le traumatisme subis par les proches du fait du décès de la victime directe.
Préjudices indemnisables des victimes indirectes suite à la survie de la victime directe
1 – Préjudices patrimoniaux
Pertes de revenus des proches
Les importantes séquelles conservées par la victime peuvent engendrer une perte de revenus du foyer et des membres de sa famille.
Exemple : arrêt ou changement d’activité professionnelle pour assister au quotidien la victime
Frais divers des proches
Il s’agit de frais spécifiques assumés par les proches pour l’accompagnement de la victime : frais de transport, frais d’hébergement et de restauration.
2 – Préjudices extra-patrimoniaux
Préjudice d’affection ou préjudice moral
Le préjudice d’affection vise à indemniser les souffrances et le traumatisme subis par les proches du fait du lourd handicap conservé par la victime directe.
Préjudices extra-patrimoniaux exceptionnels
Préjudices subis par les proches de la victime partageant habituellement une communauté de vie effective et affective, bouleversant les conditions d’existence et de mode de vie du foyer.